Dans un rapport diffusé mi-juin 2015, l’Institut de veille sanitaire (InVS), le réseau des registres des cancers Francim, le service de biostatistique des Hospices Civils de Lyon (HCL), et l’Institut national du cancer (INCa) publient de nouvelles estimations départementales de l’incidence des cancers.
Cette étude porte sur la période 2008-2010 et l’ensemble du territoire métropolitain, concerne huit cancers chez l’homme et chez la femme4, pour lesquels des estimations départementales étaient possibles.
Cancers du poumon, 2008-2010 : carte des SIR estimés
Tabagisme et consommation d'alcool : des facteurs de risque majeurs pour les hommes
Les résultats les plus facilement interprétables concernent les pathologies cancéreuses pour lesquelles le tabagisme et la consommation d’alcool constituent des facteurs de risque majeurs. Dans cette étude, il s’agit des cancers des lèvres-bouche-pharynx, du larynx, du poumon et de l’œsophage. Chez les hommes en particulier, on observe une surincidence très prononcée dans les départements du nord de la France pour ces localisations cancéreuses : le Pas-de-Calais (62), le Nord (59) et la Seine Maritime (76) (hormis pour le cancer de l’œsophage). Ces disparités départementales semblent correspondre aux variations d’exposition des populations à ces facteurs de risque. Par rapport à la moyenne nationale (20,6 cas incidents pour 100 000 pour le cancer des lèvres-bouche-pharynx ; 6,0 pour le larynx ; 49,7 pour le poumon et 7,0 pour l’œsophage), on observe pour ces cancers une incidence très élevée, notamment dans le Pas-de-Calais (respectivement selon le type de cancer : 38,1 – 7,9 – 64,5 – 13,3), le Nord (31,6 – 9,2 – 63,0 – 13,3) et la Seine-Maritime (27,5 – 8,0 – 61,1 – 8,0). Parallèlement, les départements de l’ouest et du sud de la France sont en situation de sous-incidence pour ces cancers.
Chez les femmes, le cancer du poumon suivrait l'urbanisation
Chez les femmes, la situation est plus difficile à interpréter. Pour le cancer du poumon, les départements présentant une surincidence se situent dans le sud de la France. Les résultats de l’étude révèlent une sur-incidence du cancer du poumon dans le sud de la France chez les femmes par rapport à la moyenne nationale (15,2 cas incidents pour 100 000), notamment dans les départements urbanisés (Alpes-Maritimes : 18,6 ; Hérault : 19,0 ; Haute-Garonne : 18,6 et dans une moindre mesure Var : 17,4) et en Île-de-France (17,5), et une sous-incidence dans l’ouest et le nord.
Une consommation de tabac chez les femmes géographiquement dispersée pour les femmes
Pour les autres cancers étudiés, les disparités départementales sont moins nettes. Il s’agit de cancers dont les facteurs de risque sont moins connus. Pour les cancers des lèvres-bouche-pharynx, l’incidence chez les femmes étant faible, seul un petit nombre de départements présente une incidence statistiquement significative (sous ou surincidence). On trouve cependant une surincidence dans les départements du Finistère (29) et du Pas-de-Calais (62) comme pour les hommes. Ces observations pourraient être induites par une géographie du tabagisme différente selon le sexe, ce qui semblerait moins vrai pour la consommation d’alcool [20].
L’incidence est peu contrastée pour les cancers gynécologiques. Cette situation peut être la conséquence de l’absence de facteurs de risque prononcés pour ces cancers ou de l’existence de facteurs de risque non spatialement structurés au niveau départemental. Le niveau départemental n’est peut-être pas assez fin pour mettre en évidence des différences spatiales (par exemple, inégalités sociales et cancer du col de l’utérus). Ces mêmes raisons pourraient expliquer le fait qu’on ne retrouve pas de similitude entre la répartition départementale de l’incidence du cancer du corps de l’utérus et celle de l’ovaire alors que ces deux cancers partagent des facteurs de risque communs.
Cette étude, inscrite dans le plan cancer 2014-2019, est réalisée dans le cadre d’un programme de travail partenarial qui vise à optimiser la surveillance et l’observation des cancers à partir des données des registres, afin de mieux éclairer les décideurs et les politiques de santé publique.